1. Que dit le Gouvernement wallon ?

Dans sa déclaration de politique régionale, le nouveau Gouvernement wallon indique : «  Le mécanisme des titres-services sera réformé en assurant les droits sociaux des travailleurs du secteur et en garantissant la maîtrise budgétaire du mécanisme et son approche de proximité. Préalablement, le financement des entreprises agréées sera revu en vue d’assurer leur pérennité.  »

Il convient de signaler que, sous la législature précédente, le système des titres-services a été réformé en profondeur.

Les modifications suggérées ont touché toutes les parties impliquent du dispositif :

  • Travailleuses : temps de travail, formation, sécurité, visite médicale, frais de déplacements…
  • Entreprises : financement, obligations liées à l’agrément, interdiction de facturer des frais supplémentaires
  • Utilisateurs : augmentation de la valeur faciale du titre-service (10€ au lieu de 9€) et révision des paliers d’achats.
  • Région : méthode d’indexation de la subvention

Un arrêt du Conseil d’État [1] a, pour partie, suspendu certaines mesures de cette réforme à savoir l’interdiction de facturer des frais supplémentaires et l’obligation pour les entreprises de mieux rembourser les frais de déplacement de leurs travailleuses.

2. Comment ça fonctionne ?

Pour rappel, le système des titres-services poursuit trois objectifs :

  1. Augmenter le taux d’emploi chez les publics éloignés de l’emploi (faiblement qualifiés)
  2. Diminuer le travail au noir ou au gris
  3. Améliorer l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle pour les ménages

Les prestations autorisées [2] dans ce secteur sont les suivantes :

  • Au domicile de l’utilisateur :
    • Nettoyage de domicile
    • Lessive et repassage
    • Petits travaux de couture occasionnels
    • Préparation des repas
  • En dehors du domicile de l’utilisateur :
    • Les courses ménagères
    • Le transport accompagné de personnes à mobilité réduite
    • Le repassage et le raccommodage du linge à repasser

L’utilisateur paie 1 titre-service par heure prestée.

Le prix est fixé de la manière suivante :

  • 10 EUR pour les 175 premiers titres-services acquis par année civile (ménage X2) ;
  • 11 EUR pour les 176e à 400e titres-services acquis par année civile (ménage X2) ;
  • 12 EUR pour les 401e à 500e titres-services par année civile (ménage X2).

La déduction fiscale est de 10 % (soit 1€) sur les 150 premiers titres-services achetés par personne, par année fiscale.

L’entreprise reçoit 29,36€ par titre-service. Dès lors, l’intervention publique pour l’entreprise est de 29,36€ – 10€ = 19,36€ (18,36€ si le TS était au prix de 11€). Pluxee est chargée du remboursement des TS aux entreprises.

3. Concrètement pour le portefeuille des citoyens

Sur base de l’avis du Conseil d’Etat et suite aux demandes de Federgon [3] , il est fort probable que le Gouvernement autorise à nouveaux les frais complémentaires.

Sachant que pour Federgon, la valeur d’échange devrait être augmentée de 5€, il y a fort à parier que les entreprises réclameront des frais complémentaires conséquents.

Afin de pouvoir chiffrer l’impact sur le portefeuille des ménages wallons, il convient de s’intéresser à la consommation de titres-services des utilisateurs wallons.

Au niveau des statistiques sur l’utilisation des titres-services, nous savons que la moyenne est de 107 TS/an par consommateur .

La difficulté de ces statistiques est qu’il s’agit de montant par utilisateur. Or, dans un couple, afin de ne pas dépasser les paliers (ou pour répartir la dépense), les deux membres d’un même ménage peuvent acheter des titres services.

Dans ce cas, si on se base sur la médiane, le ménage médian utiliserait 162 ts/an (81*2).

Dès lors, si le Gouvernement autorisait à nouvelles les entreprises à facturer des frais supplémentaires et que ces dernières réclamaient 2,5€/h (soit la moitié de la demande de Federgon), cela reviendrait à une augmentation annuelle de 405€/an soit 34€/mois de plus par ménage.

Le coût annuel de ce service passerait à 2025€/an (avant déduction fiscale).

Par contre, si Federgon appliquait réellement sa demande d’augmentation de 5€, le coût annuel pour les ménages serait de 810€/an soit 68€ de plus par mois .

Le coût annuel de ce service passerait alors à 2430€ (avant déduction fiscale).

4. Impact sur les travailleuses

Si le Gouvernement venait à autoriser à nouveau la facturation de frais complémentaires, cela impacterait également les travailleurs et les travailleuses.

En effet, suite à l’augmentation de la tarification horaire, certains utilisateurs seront tentés d’avoir recours au travail au noir ; plongeant ainsi certains travailleurs et certaines travailleuses dans la précarité.

D’autres utilisateurs garderaient leur aide-ménagère mais réduiraient le nombre d’heures de prestation hebdomadaire (tout en espérant le même niveau de qualité). Les travailleurs et les travailleuses se retrouveraient alors à devoir accomplir davantage de tâches en moins de temps. Cela se ferait dès lors au détriment de leurs conditions de travail et de leur bien-être.

Sources et liens

[1] 4 octobre 2024

[2] Il convient de rappeler que le MR a toujours souhaité que la garde d’enfants (baby-sitting) et le transport d’enfants vers l’école puissent être rémunérés via des titres-services.

[3] Mémorandum pour le secteur des titres-services : propositions pour un avenir durable du secteur (Federgon 27-05-2024)